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Les logiciels en voie de brevetabilité en Europe

Les acteurs du logiciel libre sont en colère. L’Office Européen des brevets (OEB) vient de remanier la directive (où tout ce qui apparaît en rouge est nouveau) de la Convention sur la délivrance de brevets européens (CBE), signée à Munich en 1973 et définissant ce qui peut être breveté ou non en matière de logiciels informatiques, de méthodes intellectuelles et de mathématiques. Dans la partie « Programmes d’ordinateurs » de ce charabia technocratique, on peut notamment y lire que « bien que les ‘programmes d’ordinateurs’ figurent parmi les éléments exclus de la brevetabilité qui sont énumérés à l’article 52(2), si l’objet revendiqué présente un caractère technique, il n’est pas exclu de la brevetabilité par les dispositions de l’art. 52(2) et (3) CBE ». Autrement dit, la nouvelle directive officialise la possibilité de breveter des logiciels informatiques, chose jusqu’alors exclue en Europe.

Pour Stéfane Fermigier, président de l’Association francophone des utilisateurs de Linux et des logiciels libres (AFUL), cette nouvelle directive est un « processus de réflexion mené de manière non démocratique » qui risque de s’appliquer aux vingt pays membres du Conseil de l’Europe et signataires de la CBE. Par un effet de règles de fonctionnement, « seuls les pays membres peuvent s’opposer à cette directive », explique Stéfane Fermigier qui regrette l’attitude du gouvernement français « qui fait le dos rond ». Et ce d’autant qu’il y a un an, à l’occasion d’une conférence diplomatique européenne, les politiques avaient exprimé leur intention de maintenir les programmes d’ordinateurs en dehors du système des brevets européens tout en souhaitant renforcer leur contrôle sur l’OEB. Des paroles en l’air visiblement, puisqu’elles n’ont en rien gêné le travail de l’OEB. Cette fois, après maintes tentatives, l’OEB pourrait atteindre son objectif et faire admettre qu’un brevet peut s’appliquer à un programme informatique comme à toute autre invention.

EuroLinux lance un ultimatum aux Etats européens

D’où la colère des représentants du logiciel libre qui, par la voix de l’association EuroLinux, ne demandent pas moins que la tête des dirigeants de l’OEB qu’ils accusent d’avoir « sciemment tenté de se soustraire au contrôle des gouvernements européens par des manoeuvres administratives juridiquement aventureuses ». A travers une pétition en ligne, EuroLinux demande donc aux gouvernements européens de « se prononcer clairement contre la brevetabilité du logiciel et des innovations immatérielles, de démontrer leur capacité à contrôler l’Office européen en limogeant dans les plus brefs délais les responsables des violations répétées à la Convention Européenne du Brevet et aux décisions de la Conférence Diplomatique ». Et si les gouvernements restent sourds à l’appel, « nous agirons autrement », prévient Stéfane Fermigier.

Pour le porte-parole de l’AFUL, « le brevet n’est pas qu’un moyen d’exiger une rémunération sur chaque logiciel, distribué librement ou non, qui exploite une licence, c’est aussi un moyen de pénaliser la concurrence et l’innovation technologique ». Il rappelle notamment que le MP3 ou la technologie d’affichage des polices True Type sont brevetés et susceptibles d’exiger une forte rémunération pour chaque logiciel qui les exploite. Ce coût supplémentaire fut d’ailleurs l’un des arguments, justifié ou non, de Microsoft pour ne pas intégrer l’encodage des fichiers en MP3 sur son Media Player 8 (voir édition du 13 avril 2001). Par ailleurs, Linux ne devrait pas exploiter la propriété d’affichage des police True Type, ce qui nuirait à la qualité de l’OS pour des raisons juridiques plus que techniques. Le grand paradoxe serait que les administrations européennes, qui se vantent de passer leur architecture informatique sous Linux, se retrouveraient dans une situation illégale à exploiter des logiciels qui ne respectent pas la convention sur les brevets. Une situation ubuesque que les gouvernements ne souhaitent sûrement pas avoir à gérer.

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