La plate-forme Mac en question chez Adobe ?

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Avec des revenus logiciels répartis à hauteur de 63 % pour la plate-forme Wintel et 37 % pour le Mac, la migration des produits Adobe vers Mac OS X est compromise : la firme s’attend à voir la part de ses revenus Mac décliner. Son absence à MacWorld New York le 17 juillet pourrait être révélatrice de son hésitation. Viendra ou viendra pas sur Mac OS X ?

Malgré la confiance affichée de Bruce Chizen, l’actuel PDG d’Adobe, à chaque fois qu’il monte sur scène avec Steve Jobs (voir édition du 21 juillet 2000), Adobe semble en pleine réflexion sur la migration de ses produits vers Mac OS X. Alors que la firme faisait partie, dès 1997, des plus importants éditeurs demandeurs d’un environnement de transition (l’environnement Carbon) pour ne pas avoir à sauter à pieds joints dans le nouveau système. Oui, mais la répartition de ses revenus a changé depuis : en 1997, Adobe réalisait près de 50 % de son chiffre d’affaires sur la plate-forme Mac. Aujourd’hui, près des deux tiers du chiffre d’affaires d’Adobe se font donc maintenant sur PC. La progression des ventes pour le marché des PC est de plus supérieure à la progression de ses ventes pour Mac : 39 % pour le premier contre 15 pour le second.

Les griefs d’Adobe

Plusieurs raisons semblent expliquer qu’Adobe rechigne à sauter le pas. Et tout d’abord la raison économique. La part du Mac dans les revenus de la firme, selon ses propres prévisions, devrait encore chuter. Or, le portage de ses applications (une carbonisation dans bon nombre de cas) va engendrer un coût dont le retour sur investissement sera long… si la révolution Mac OS X ne prend pas ! Mac OS X, justement, est un autre souci pour Adobe : le système et plus particulièrement les API Carbon seraient trop bogués, si un témoignage que rapporte The Register est digne de confiance. Les dirigeants se poseraient également des questions sur la compétitivité du G4 et de son successeur, le G5. Les analystes d’Adobe sont vraisemblablement inquiets également de l’inertie des professionnels du graphisme sur plate-forme Mac : cette population ne réalise de mise à jour de ses solutions que tardivement. La firme de Bruce Chizen reprocherait enfin une « broutille » à Apple : Final Cut Pro vient concurrencer directement l’un de ses produits, Premiere.

Les rumeurs qui courent sur le Web actuellement pourraient donc paraître fondées s’il n’y avait les efforts d’Apple et la fidélité à toute épreuve de Steve Jobs envers Adobe. C’est Jobs qui a fait d’Adobe ce qu’elle est aujourd’hui, après 16 années de bons et loyaux services. Le secteur de la PAO se fait majoritairement sur plate-forme Apple. Display PostScript, c’est Jobs. Aujourd’hui, alors que Mac OS X se base sur un modèle de représentation d’image 2D fondé sur le format PDF soutenu par Adobe, et que son système est également reconnu par les professionnels comme la plate-forme de choix pour les animations 3D (voir le dossier sur Quartz de SVM Mac), Adobe aurait tort d’abandonner le Mac. Acrobat, After Effects, InDesign, LiveMotion, PageMaker, Photoshop et Premiere seraient en cours de « carbonisation ». Pas nécessairement à un rythme soutenu toutefois. GoLive, Illustrator et Streamline en seraient au stade de versions alpha.

Adobe ne quittera donc sans doute pas la plate-forme aussi vite. D’autant que de sérieux concurrents comme Quark (voir édition du jour), Macromedia ou Corel font du Mac une plate-forme de relance de leur croissance. Avec des revenus qui s’orientent de plus en plus vers le Web publishing, l’e-paper solution et le cross-media publishing, au détriment des licences PostScript et de ses autres activités, Adobe veut continuer sa croissance. Par conséquent, Apple a de sérieuses raisons de chercher à faire progresser son OS – que son ami de 16 ans ne trouve pas assez travaillé – et la vitesse de ses processeurs, pour contrecarrer l’avancée de la plate-forme Wintel. Elle semble y travailler sérieusement (voir édition du 5 juillet 2001) et pas seulement par amitié…