PRISM : le « big brother data » au service de la lutte antiterrorisme aux USA ?

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La révélation de Prism provoque des remous. Cette méga-plateforme d’écoutes électroniques, exploitée par le renseignement américain, aurait un accès direct aux serveurs des plus grandes firmes Internet (Google, Microsoft, Facebook…).

La polémique sur l’espionnage de masse des abonnés de l’opérateur télécoms Verizon par la NSA n’était que le bout de la lorgnette.

Avec PRISM, on passe au stade de l’espionnage de l’Internet au niveau mondial pour le compte des services de renseignement des Etats-Unis.

Entre fantasme, tentative de désinformation et la réalité de l’exploitation des données collectées, il est difficile de mesure l’ampleur de ce vaste programme d’écoute sur Internet.

Des médias comme The Washington Post et The Guardian (Royaume-Uni) montent en première ligne pour découvrir les facettes de ce cyberespionnage à grande échelle.

Prism serait-il le digne successeur des oreilles électroniques du programme Echelon qui a sévi à la fin des années 90 ?

On n’est pas vraiment surpris que la NSA trace les communications Web en arguant de la lutte anti-terroriste.

Mais des soupçons demeurent sur la dimension de l’espionnage politique et économique ou du respect à la vie privée.

Les médias américains soulignent également que le programme Prism – initialement frappé de sceau « top secret » – ait été étendu au cours des mandats présidentiels de George W. Bush et de Barack Obama.

Une dérive voire un scandale d’Etat, estiment les associations de défense des libertés civiques.

Mais les indignations et les protestations de concert dépassent les cercles du militantisme au regard des risques d’atteinte à la vie privée. Du pain béni pour les Anonymous ?

Mesurez l’ampleur : Microsoft, Skype, Google, YouTube, Yahoo, Facebook, AOL, Apple, PalTalk…Dans la période 2007 – 2011, tous les « géants » du Net auraient été progressivement intégrés dans un programme secret de la puissante agence de renseignement National Security Agency.

Ses agents seraient en mesure d’analyser en temps réel les communications interpersonnelles : e-mails, photos, vidéos, session de chats…

De son côté, James Clapper, Directeur national du renseignement, confirme l’existence du programme Prism permettant de traiter une volumétrie d’informations impressionnantes que les analystes sont chargés de filtrer au nom de la sécurité nationale.

Une facette « big data » ou exploitation massive de données qui donne des sueurs froides (et pour cela, je vous invite à consulter l’interview vidéo de Bernard Ourghanlian, Directeur technique de Microsoft France, à propos de la sécurité, du big data et de ses potentielles dérives).

Autre révélation : James Clapper précise que Prism couvre tous les pays dans le monde sauf les Etats-Unis (personnes visant sur le sol américain ou les ressortissants américains).

Comment réagissent les neuf firmes Internet pointées du doigt ? Elle démentent avec fermeté l’existence de passerelles avec le FBI et la NSA.

Il n’existe pas d’accès direct aux informations de ses membres à partir de leurs serveurs, clament-ils.

Ainsi, Google tempère. « Nous sommes profondément attachés à la sécurité des données des utilisateurs. Nous dévoilons des données au gouvernement en accord avec la loi, et nous examinons toutes ces requêtes attentivement », a réagi le service de communication.

« De temps à autre, des gens affirment que nous avons créé une ‘porte dérobée’ pour le gouvernement dans nos systèmes, mais Google n’a pas de backdoor’.

Dans cette cacophonie, le président Barack Obama est intervenu directement pour garantir que « les mesures de surveillance des communications par téléphone et Internet ne violent en rien la Constitution américaine et permettent de protéger la sécurité nationale. »

La Maison Blanche assume : « En extrapolant, on peut se plaindre de ‘Big Brother’ et de risques de dérive. Mais, dans les détails, je pense que le bon équilibre a été trouvé. »

Interrogé par Reuters, un haut fonctionnaire de Washington (anonyme) précise à propos de Prism : « Ce programme a récemment été de nouveau autorisé par le Congrès après de nombreux débats et auditions (…)Les informations collectées sont parmi les renseignements les plus importants et les plus précieux que nous recueillons. »

Au Congrès, nombreux sont les parlementaires (démocrates ou républicains) qui ont apporté leur soutien à l’exécutif. En arguant qu’un attentat a été déjoué grâce aux saisies des données téléphoniques.

Prism : la Commission européenne muette
Du côté de l’Union européenne, la révélation de Prism commence à provoquer des remous.  L’eurodéputée socialiste Françoise Castex demande à la Commission européenne « de confirmer l’existence de telles pratiques ». Et elle ne manque pas de rappeller avec virulence que « ce scandale éclate alors que la législation européenne sur la protection des données personnelles est en cours de révision ». Une procédure qui « fait l’objet d’un lobbying insupportable des industries géants américains du Net, et ce, avec le concours du gouvernement américain. » Après avoir exprimé ses inquiétudes vis-à-vis du Patriot Act, Françoise Castex enfonce le clou et somme Bruxelles « d’agir afin de protéger la vie privée des ressortissants de l’Union européenne en particulier sur le cloud face la toute-puissance du Foreign Intelligence Surveillance Amendment Act (FISAA). » On attend la réaction de la Commission européenne.

Credit photo :  Shutterstock.com – Copyright : Bruce Rolff

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